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Kugelschreiber blog
9 avril 2008

L'homme qui ne sentait pas le satin

Urgences

Soirée de garde aux urgences : ce n'était pas un week-end ni même une de ces fêtes ou les fêtards abusent de l'alcool, mais on devait pour des raisons -éthiques- héberger des exogènoses (cas d'ivresse) pour cuver leur alcool entre les murs des box de l'hôpital, de peur qu'ils s'agressent ou qu'ils agressent autrui. On se substituait à la police tout en prodiguant des soins médicaux. On devait surtout gérer leur humeur labile et agressive par moment. Et quand cette tache de baby-sitting s'avérait compliquée, ces patients bourrés cuvaient les grammes d'alcoolémies derrière les barreaux du poste de police.

C'était donc une soirée de garde comme les autre ou presque. Vers minuit, un SDF se présentât soûl comme un polonais avec une entaille de l'arcade sourcilière à suturer. Maryline, l'infirmière, nous décrivit, furtivement, les émanations olfactives qui se dégageaient de ce patient pas comme les autres. Je restais insensible à ses descriptions décidemment repoussantes. Je finis par rétorquer un peu fière que j'avais une hyposmie, et que j'avais la chance de ne sentir que les odeurs fortes, loin de moi l'idée que celle ci allait l'être. Mon co-interne, Remy était déjà sur le coup de la plaie, il manageait (comme souvent on le fait) l'externe pour la suture. Je me décidai neomoins d'aller jeter un coup d'oeil sur cette arcade amochée. A peine les pieds dans le couloir qui mène aux box des patients que j’étais envahie par une odeur lourde, pesante, étouffante. Pendant un laps de temps, choquée, je doutai de la véracité et authenticité de ce que mon sens de l'odorat me renvoyait. J'en étais même arrivée à me poser la question : suis-je victime d'une parosmie ? L'anticipation des propos de Maryline serait-elle à l'origine de cette infâme cacosmie ? Car infâme, elle l'était. Une forte odeur de moisit imprégnait le couloir, à tel point qu'on pouvait se diriger à l'odorat pour retrouver l'homme décidemment ivre. La situation était tellement incroyable qu'elle allait bientôt m'amuser.

Remy, d'habitude zen comme un bouddha, s'affairait irrité par les senteurs qui s'exhalaient non plus de l'homme mais des mètres cubes d'espace qu'il occupait. Il s'agissait d'en faire abstraction et de suturer cette plaie avant qu'elle s'infecte (enfin, vu les croûtes de crasse qui enveloppait sa chaire, l'infection, est un terme bien relatif). On s'y est mis à trois après de longues minutes d'explications donné à un patient out of space qui ne semblait pas comprendre l'intérêt de notre travail. On devait le suturer ! Il ne voulait point que je tienne ses mains crasseuses qu'il ramenaient inexorablement à sa plaie. Il ne voulait point que Remy maintienne sa cabessa sur le lit. On "sanglait" avec la force d'Hercule cet homme soûl qui ne se laissait que rarement faire, et je donnais mes instructions à l'externe quant à l'opération délicate de l'anesthésie. Ce n'est pas parce qu'il est ivre qu'on suturera le bonhomme à vif!  A peine la fine aiguille jaune percait son front qu'il criait comme ces primipares qui guelaient comme des bêtes accouchent à la maternité du CHU de Casablanca, ce qui nous n'empêcha nullement de continuer à le sangler et le piquer (pour son bien). L'ardeur de la tache et surtout les chewing gums fortement parfumés que nous mâchions nous faisaient oublier les désagréments de la cacosmie. La situation était telle que la promiscuité de nos quatre corps en devenait désuète.

L'homme avait beau s'opposer à nos tentatives et être désagréable, Remy, fortement agacé par cette aventure, ne faillit pas à sa politesse et ponctuait quand même ses explications par des "s'il vous plait monsieur" tout en haussant le ton. Certe c'était un monsieur, mais rien ne lui plaisait mon cher Remy, son jugment étant altéré par les décilitres d'alcool.

Au plus fort de ses divagations, ce monsieur, fort aimable, intrigué par mes mains qui tenaient les siennes, m'avouera amusé (avec un sourire qui dévoila une mâchoire faite de trois dents complètement jaunies) TU NE M'ATTIRES PAS MADEMOISELLE .... Décidement, fêtards ou pas, les mâles ont les mêmes sujets de conversations.

Finalement, on laissa tomber la suture, et on revient à la charge avec une agrafeuse pour traiter son mal. On s'y est pris à trois pour l'immobiliser complètement alors qu'Alexis (notre chef de garde) enfonçait dans sa chaire des agrafes. La plaie s'étendant jusqu'à la partie supérieure de la paupière, le geste devait être extrêmement douloureux. « Le polonais », cuva tranquillement la nuitée dans son lit ce qu’il avait ingurgité dans les tablées arrosées d’alcool de mauvaise qualité sous les ponts d’une ville surprise par les neiges d’avril.

Finalement, cet SDF, reflet de la misère de la société française, avait la chance de ne pas sentir le sapin, même s’il était loin de sentir de satin.

DNR

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Commentaires
D
No comment !!!!!!!!!!! sinon que je constate que tu es tjr attirée par les bonnes odeurs :)
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K
"TU NE M'ATTIRES PAS MADEMOISELLE .... Décidement, fêtards ou pas, les mâles ont les mêmes sujets de conversations."<br /> Pchakhhhhhhhhhhhhh,si papa lit ce passage il prendra l'avion " surtt pas un vol jetquatyou ;)" bach isebn wi nechr le polonais, Remarque il en a besoin vu que kaykouwekh!!<br /> t'aurais dû lui dire que t'es pas une mouche pr être attirée par une personne qui pue.<br /> Olahila d7ektini.
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